Comment choisir le bon aliment pour votre troupeau laitier?



La question fondamentale pour un éleveur : comment et sur quels critères dois-je choisir mes aliments ? Voilà une bonne question. 
Je vais tenter de vous apporter des éléments pour prendre vos décisions plus facilement.





On va d’abord prendre un cas précis pour ne pas parler dans le vide et ne dire que des banalités. Considérons un éleveur laitier, amené à faire un choix sur un correcteur azoté par exemple. Les éleveurs allaitants vont m’en vouloir, mais je vous promets que je ferai des articles spécifiques par la suite.

Le premier critère qui vient en tête, c’est le prix !




Et oui, je crois que je vous connais bien. Derrière votre écran, ce qui vous est venu le plus vite, c’est le prix ! Mais quel prix ?
Le prix à la tonne ? Pour moi ce n’est pas un critère intéressant. Je m’explique, un vendeur d’aliments peut vous proposer un correcteur 42 MAT à 336 euros/Tonne et un correcteur 38 MAT à 315 euros/T. Or vous voyez bien où je veux en venir. L’un contient 42 points de protéines, l’autre 38. Ce ne sont pas des produits comparables. Donc première étape assez simple, prenez votre prix à la Tonne et divisez le par les points de MAT (protéines). Ici, le premier correcteur revient à 336/42 = 8 euros/Point de MAT, le deuxième à près de 8,3 euros/Point de MAT. Etant donné que l’on amène un correcteur azoté essentiellement pour son apport de protéines, avoir un raisonnement basique au prix/tonne vous aurait induit en erreur sur ce coup.

Comment juger de la qualité du correcteur azoté


Une fois cette étape franchie, elle nous donne une idée mais ne doit pas être le seul critère de choix. Il faut désormais essayer d’apprécier la qualité de l’aliment, et son intérêt dans VOTRE ration d’après une étiquette ou une composition affichée par votre vendeur d’aliments. Et c’est là que cela se complique. Pour vous donnez des éléments, tout en restant simple, je vais vous indiquer les vitesses de dégradation dans la panse des composants les plus utilisés dans les correcteurs azotés. En face, on indiquera les vitesses de dégradation des sources d’énergie les plus couramment utilisées dans nos rations. Car comme vous le savez, c’est essentiellement l’équilibre entre l’énergie et la protéine de votre ration qui permettra à vos vaches de transformer votre ration en lait.

Les principaux composants d’un correcteur et leur vitesse de dégradation dans la panse


Des « + » solubles aux « - »  solubles :

Urée : L’urée est en fait de l’azote soluble qui se dégrade très rapidement dans la panse, en quelques heures.
Pois et Féverole : Azote soluble mais avec un apport d’énergie combiné qui peut être intéressant
Tourteaux de tournesol: Riche en azote soluble, il a tendance à se dégrader assez rapidement
Tourteaux de Colza : Entre le tourteau de tournesol et le tourteau de soja
Tourteaux de Soja : L’azote est disponible sur une large plage. Se dégrade néanmoins plus lentement que le colza.
Tourteaux de lin : Tout comme le soja, il se dégrade assez lentement et sur une large plage. En plus il contient souvent plus de matière grasse qui est une source d’énergie intéressante.

Bien entendu, cette liste est hyper simpliste car il existe différentes qualités pour chacun de ces tourteaux selon s’ils sont plus ou moins pressés par exemple, ce qui change leurs caractéristiques. Cependant, cela vous donne des repères.

En face de cela, l’énergie. De la même façon et afin de schématiser, il existe 4 sources d’énergie bien distinctes :
-       L’amidon (présent dans vos céréales notamment)
-       Le sucre (mélasse, betteraves…)
-       La cellulose (pulpes, ensilages…)
-       La matière grasse (huile de palme, lin…)

Les aliments rapportant du sucre se dégradent très rapidement. Le sucre est en fait immédiatement disponible.
Au niveau des amidons, ils sont plus ou moins fermentescibles, c’est à dire qu’ils se dégradent plus ou moins vite dans la panse. Avec les céréales les plus connues, cela donne :

+ rapide :        Blé
                      Seigle
      au            Triticale
                      Orge
- rapide           Maïs

La cellulose quand à elle se dégrade assez lentement. Elle est une source d’énergie très sécurisante car n’oublions pas que plus on incorpore dans notre ration des sources d’énergie qui se dégradent vite, plus on courre de risque d’acidose, surtout si la structure de notre ration (cf article précédent) n’est pas bonne.

La ration est donc un équilibre de tout cela. Mais pour revenir à notre correcteur azoté. Si j’ai une ration avec une base d’ensilage de maïs à 2/3 et 1/3 d’ens d’herbe (de bonne qualité et avec une protéine assez soluble) + de la fibre, et que l’on me propose un correcteur azoté très soluble (de type colza/tournesol/urée) il y a de très forte chance que cela ne fonctionne pas. Et n’oubliez pas que la plupart du temps, les sources les plus solubles (qui se dégradent vite) sont souvent les moins chères à la Tonne…

Le choix doit donc être un compromis entre le cout/point de MAT et la composition de l’aliment. Aujourd’hui les vendeurs ne sont plus obligés d’indiquer les proportions de chaque élément mais ils sont quand même tenus d’inscrire sur l’étiquette les composants dans leur ordre d’importance dans la formule. Donc tous à vos étiquettes. Sachez ce que vous achetez !

La relation avec votre vendeur d’aliment


Tous les points précédents sont des aspects techniques. Mais nous ne sommes pas des machines, l’aspect humain peut bien sûr entrer en compte dans votre choix. Cependant, j’aimerais souligner deux éléments.

Le premier, c’est que ce choix a un impact direct sur votre marge. Et oui, il peut améliorer ou détériorer l’efficacité alimentaire de votre troupeau et donc votre marge sur cout alimentaire. Ce n’est donc pas un choix à faire à la légère.

Deuxième point qui me semble important : la démarche de votre vendeur d’aliments. Le choix d’un aliment se fait en fonction de votre ration mais surtout de ce que l’on observe sur le troupeau et au niveau des bouses. Il me paraît donc difficile de proposer des formules sans un passage dans l’étable ou au près pour voir les vaches. Bien entendu, certains vous connaissent bien et connaissent plutôt bien le troupeau, mais les plus professionnels d’entre eux iront toujours de temps en temps vérifier que tout se passe bien « au cul des vaches ».

Rappelez vous, votre poste « alimentation » au complet (fourrages compris) peut représenter de 50 000 à parfois plus de 100 000 euros par an. C’est votre principal poste de charge variable !

Je pense aborder dans un prochain article les sous produits et leur utilisation car de la même façon on entend beaucoup de choses sans vraiment savoir faire la différence entre le vrai et le faux. N’hésitez pas à me faire part de vos remarques, commentaires, sujets à aborder…

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